traduction approximative d un article publie en arabe dans akhbar al yawm en 2018
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Parmi les nombreux témoignages qui mettent en lumière le caractère fort et l’esprit de défi du défunt Hassan II, je suis heureux d’en mentionner un particulièrement marquant, qui remonte à son adolescence.
À l’âge de 14 ou 15 ans ce jeune prince devait effectuer une visite au mausolée de Moulay Idriss à Fès, représentant son père.
Mon oncle défunt, Si Tahami Lebbar, l’un des grands dirigeants du mouvement national et un leader de la résistance armée lors de l’exil de Mohammed V (1953-1955), m’avait remis une copie de ses mémoires avant sa mort, relatant un témoignage exceptionnel en liaison avec cette visite.
Le regretté militant Si Tahami Lebbar raconte qu’à cette époque, en tant qu’étudiant au lycée Moulay Idriss de Fès et membre de l’association des scouts islamiques Hassaniens, faisait partie de l’équipe de scouts chargee d accompagner le jeune prince lors de cette visite.
Comme l’association hassanienne avait demandé à feu Mohammed V de leur fournir des vélos pour faciliter les déplacements de ses membres, et que les autorités françaises, représentées par le chef de camp français, n’en avaient livré que deux sur les six envoyés, distribuant les quatre autres aux associations de scouts françaises et israéliennes, il avait été décidé que l’association protesterait contre cette injustice en informant le jeune prince de l’affaire pour qu’il la transmette à son père.
Imaginez la scène : les jeunes étudiants en uniforme de scouts accompagnant le jeune prince de Bab Boujloud au mausolée de Moulay Idriss, parcourant des ruelles étroites et sinueuses avec des descentes raides, tout en suivant le cortège à une allure rapide. Dans ce contexte, mon oncle feu Si Tahami Lebbar s approche du jeune prince pour lui raconter l’histoire : « Nous voulons exprimer notre gratitude à Sa Majesté pour les vélos que SM nous a envoyés, mais le chef de camp ne nous en a livre que deux sur les six reçus. »
et au moment ou il s’apprêtait à lui expliquer que les autres associations qui avaient reçu les quatre vélos restants disposaient déjà de leurs propres moyens de transport, le jeune prince l’a brusquement interrompu de manière inattendue, en lui lançant une phrase en français tout à fait surprenante : « Depuis quand crois-tu qu’on va te donner tes droits ? »
C’était une réponse tellement brutale et profondément marquante de la part d’un prince adolescent Inattendue dans de telles circonstances, qui va marque son comportement tout au long de sa vie active.
En revisitant le parcours de mon oncle défunt Si Tahami Lebbar, qui a lutté contre le protectorat francais pendant deux décennies et qui a continue à lutter contre toute injustice après l’indépendance, je remarque quelque chose d’étonnant : il n’a jamais cédé devant aucune injustice, quelle qu’en soit la source. Par exemple, au début des années 60, il n’a pas hésité à poursuivre en justice le puissant ministre de l’Économie de l’époque, feu Abderrahim Bouabid, et le directeur de l’Office chérifien des phosphates (OCP) de l’époque, feu Karim Lamrani, suite a son licenciemént de son poste de directeur des ressources humaines de l’Office sans justifications. Il est resté ferme devant les tribunaux jusqu’à ce qu’il ait obtenu la restitution de tous ses droits.
Lorsqu’il était super caïd à Taounate au milieu des années 60, il a été démis de ses fonctions par le général Oufkir, alors ministre de l’Intérieur, par simple télégramme, sans explications. Mon oncle n’a pas hésité à l’attaquer en justice également, et il a attendu patiemment le temps qu il faut pour récupérer ses droits face à l’homme le plus puissant du régime de Hassan II à cette époque.
L’incident de Fès et la réponse brutale, surprenante et affirmée du jeune prince ont marqué mon oncle tout au long de sa vie. en effet au milieu des années 60, il n avait pas hesite a poursuivre en justice le général Oufkir, l’homme le plus influent du royaume, chargé du ministère de l’Intérieur et de tous les services de sécurité en ces années de plomb sombres ?
Je me souviens de cette période, lorsque mon oncle était suspendu de ses fonctions et sans moyens de subsistance. Son frère, feu Haj Hafid, le soutenait financièrement en me chargant de lui faire parvenir un peux d argent pour subvenir à ses besoins quotidiens.
Mon oncle Tahami a finalement remporté son procès contre ce puissant ministre , créant un précédent juridique encore evoque aujourd’hui dans les écoles de formation des cadres du ministère de l’Intérieur.
« Depuis quand crois-tu qu’on va te donner tes droits ? » Cette phrase est restée gravée dans l’esprit de feu Si Tahami Lebbar, le poussant à lutter contre l’oppression dès son plus jeune âge, étant l’un des premiers jeunes militants nationaux à être arrêtés à Fès à la fin des années 40 en tant que membre actif du Parti de la Choura et de l’Istiqlal.
Ainsi, un incident apparemment banal concernant des vélos a révélé le caractère rebelle du jeune prince et a influencé plus tard le comportement d’un autre jeune homme, tout aussi patriote et résistant.
Idriss El Kettani
Ancien ambassadeur du Maroc au Koweït