Mon histoire avec Entraineur Faria – Épisode 11

Al-Kettani : Mon affrontement avec Maati Bouabid

Alors, comment avez-vous réagi face à leur refus de formaliser par écrit le choix de l’entraîneur ?

– À l’approche des Jeux Méditerranéens, auxquels participaient plusieurs pays comme la France, l’Espagne, l’Italie, la Turquie, l’Égypte, l’Algérie, la Tunisie, et d’autres équipes, et en l’absence d’un entraîneur pour l’équipe nationale, le ministre Semlali m’a appelé en me disant : « Vous devez exécuter le choix du Premier ministre. » Je lui ai répondu : « Je ne conteste pas ce choix, je ne suis qu’un fonctionnaire, et je suis prêt à exécuter les ordres à condition qu’ils soient formulés par écrit. » Il m’a alors dit : « Le roi demande la date d’arrivée de l’entraîneur, et vous allez vous retrouver dans des ennuis. » C’est alors que j’ai eu recours à une méthode administrative que j’avais déjà utilisée avec succès lors de mon travail à la Direction de l’Industrie au début des années 1970. Cette méthode consiste à prendre l’initiative de rappeler à l’autorité concernée les détails du dossier en question, puis à l’informer des actions que vous allez entreprendre si vous ne recevez pas d’instructions contraires. Dans ce cas, comme l’autorité concernée ne peut nier les faits présentés dans votre lettre, elle n’osera pas vous empêcher de poursuivre vos actions, vous donnant ainsi l’autorisation légale d’exécuter votre mission avec son accord écrit.

Avez-vous envoyé une lettre alors ?

– J’ai écrit au Premier ministre une lettre détaillée dans laquelle je lui exposais par fax les détails du dossier, notamment l’ordre royal de trouver un entraîneur brésilien très compétent, ma proposition de M. Travallini parmi les trois premiers candidats qui correspondaient à ce critère, et je lui ai rappelé son choix d’un entraîneur de niveau inférieur basé uniquement sur un salaire mensuel de 6 000 dollars. Je lui ai dit que j’exécuterais ses instructions dans les plus brefs délais, à moins qu’il n’ait une objection. De cette manière, j’ai documenté par écrit ce qui s’était passé, et les instructions du Premier ministre étaient désormais consignées par mes soins, sauf en cas d’opposition de sa part.

Quelle a été la réponse du Premier ministre ?

– Comme je m’y attendais, il n’a pas répondu. Bien sûr, Semlali m’a appelé, furieux, considérant que ces lettres constituaient un manque de respect envers la personne du Premier ministre.

Que s’est-il passé ensuite ?

– J’étais conscient que ma démarche serait perçue comme une rébellion contre l’autorité du Premier ministre, car, dans notre système traditionnel makhzénien, les instructions sont exécutées sans être discutées, même si elles sont souvent données verbalement. Je savais donc, en écrivant au Premier ministre, qu’il considérerait ma correspondance comme un défi à son autorité et une offense personnelle. Le principe de l’autorité dans notre pays est que le décideur n’assume pas la responsabilité des résultats négatifs, car le makhzen n’est jamais tenu responsable en toutes circonstances, et sa parole reste la loi suprême. Malheureusement, cette logique makhzénienne prédomine même chez les hommes d’État ayant une formation juridique, comme c’était le cas de Maati Bouabid et Abdelatif Semlali, que Dieu ait leurs âmes. Je le dis sans ambages : ce pays ne pourra pas emprunter la voie correcte tant que cette logique makhzénienne, profondément enracinée dans notre société depuis des siècles, continuera de prévaloir dans notre système exécutif sous prétexte de préserver l’autorité de l’État, même en dehors de la loi. Si le Premier ministre avait vraiment cru en la responsabilité et la reddition des comptes, il aurait dit, lorsque j’étais dans son bureau : « C’est mon choix, vous le recevrez par écrit, et il ne vous reste plus qu’à l’exécuter. » Cela, bien sûr, aurait été le cas si nous étions dans un État de droit, comme ces responsables le prétendaient.

Journal “Akhbar Al-Youm”, vendredi 20 juillet 2018