
Kettani : J’ai accompagné Faria au Maroc, puis mon bureau à Rio de Janeiro a été fermé
Idriss Al-Kettani, ambassadeur et conseiller économique au Brésil au début des années 1980, révèle pour la première fois à Akhbar Al-Youm des détails fascinants sur la mission que lui a confiée Hassan II pour trouver un entraîneur brésilien pour l’équipe nationale marocaine de football, ainsi que les complications qui ont accompagné cette tâche.
– Que s’est-il passé après que vous avez réussi à convaincre Faria de venir au Maroc avec vous ?
– En parcourant récemment certaines des correspondances que j’ai échangées à cette époque avec les ministères des Affaires étrangères et de la Jeunesse et des Sports, ainsi qu’avec l’ambassade à Brasilia, il m’est apparu que la venue de M. Faria au Maroc relevait presque du miracle. Les obstacles qui se sont dressés contre son arrivée au Maroc étaient divers, étranges et graves.
Le premier problème était la nécessité de l’accompagner au Maroc malgré le refus de l’ambassadeur et du secrétaire général du ministère des Affaires étrangères d’autoriser cette mission. Néanmoins, j’ai pris le risque de faire ce voyage après avoir acheté le billet de ma poche, sachant qu’ils pourraient se venger de moi sur le plan administratif. Si je ne l’avais pas fait, Faria serait-il arrivé au Maroc grâce à cette astuce que j’avais imaginée, à savoir passer une semaine au Maroc, qui aurait pu ne pas aboutir à sa rétention ?
Le deuxième problème était les retards successifs provoqués par Faria, qui nous ont contraints à reporter le voyage de plusieurs semaines et à annuler nos vols à plusieurs reprises, comme je l’ai déjà raconté. Le troisième problème, le plus grave, était la décision du ministère des Affaires étrangères de fermer mon bureau à Rio de Janeiro, en raison de ma persistance à mener à bien cette mission en dehors des procédures administratives.
– Pouvez-vous expliquer plus en détail les circonstances de la fermeture de votre bureau à Rio ?
– Après avoir insisté auprès du ministère des Affaires étrangères pour qu’il m’autorise à accompagner Faria au Maroc, et sans avoir reçu de réponse, j’ai décidé d’assumer mes responsabilités en dehors des procédures administratives. J’ai envoyé un fax au secrétaire général, lui disant que j’étais prêt à prendre en charge les frais de voyage à mes propres frais, si nécessaire, pour mener à bien la mission qui m’avait été confiée au plus haut niveau.
Je savais que ma lettre sortait des cadres administratifs habituels, mais je la trouvais justifiable selon l’adage « À décision exceptionnelle, circonstances exceptionnelles ». D’un autre côté, je relevais un défi réel, celui de réussir cette mission, même si elle ne relevait pas de mes compétences. Ce que j’ai réussi à faire, grâce à Dieu, puis à ma persévérance.
– Quelle a été leur réaction ?
– Il s’est passé quelque chose d’incroyable. Ils ont considéré que mon comportement était une provocation à leur autorité, une atteinte à leur pouvoir inacceptable. Ils ont donc décidé, de manière illégale, de fermer mon bureau de manière hollywoodienne. Le contrôleur financier de l’ambassade est arrivé à Rio de Janeiro, envoyé par l’ambassadeur pour fermer mon bureau sans m’en informer au préalable et sans présenter de décision administrative officielle mettant fin à ma mission. Il semble que le respect de la loi n’était pas une priorité pour eux.
– Qu’avez-vous fait ?
– J’ai écrit au nouveau ministre des Affaires étrangères, M. Benaïssa, qui avait succédé à M. Boucetta, pour l’informer de l’incident en lui demandant si le ministère avait décidé de mettre fin à la mission que le roi m’avait confiée pour trouver un entraîneur pour l’équipe des FAR. Après lui avoir rappelé que l’ambassadeur s’était opposé à ce que je mène cette mission sportive, malgré le fait que j’avais été mandaté par le roi, et s’était opposé à toute initiative de ma part dans le cadre de cette mission, je lui ai dit que je poursuivrais ma mission, sauf s’il avait un avis contraire.
– Quelle a été sa réponse ?
– Comme je m’y attendais, il n’a pas répondu à ma lettre. Mais, dès que j’ai accompli cette mission et que je suis arrivé au Maroc avec M. Faria, et que l’opération s’est déroulée comme je vais vous en parler en détail, mon bureau a été définitivement fermé. J’ai attendu au Maroc pendant quatre mois, sans pouvoir retourner à Rio, même pour récupérer mes affaires personnelles ou faire mes adieux aux hommes d’affaires avec lesquels j’étais sur le point de conclure des accords concernant les grands projets dont je vous ai déjà parlé.
Journal “Akhbar Al-Youm”, lundi 7 août 2018